Office national du film du Canada: les techniques d’animation innovantes de ses artisans

Office national du film du Canada (ONF) - NFB (1)

J’ai été suivre une petite formation en animation avec Tewekan Vision dans les locaux de l’Office national du film du Canada (ONF) le 24 septembre dernier. On nous a d’abord introduit aux bases de l’animation à l’aide de Photoshop grâce à une présentation de Diane O’Bomsawin. Comme il s’agissait justement du jour de la visite guidée annuelle de l’ONF, nous en avons profité pour faire le tour de la section animation. Nous avons eu l’occasion d’admirer plusieurs projets, aussi différents les uns que les autres. Trois d’entre eux ont retenu mon attention.

Au premier arrêt, c’est de façon virtuelle que nous avons rencontré Chris Landreth. Un artiste qui a fait sa marque dans le milieu. Étant donné que la connexion internet était mauvaise, il n’a pas pu nous montrer son projet actuel. Cependant, il a pris le temps de nous expliquer le synopsis: « Que se passe-t-il dans notre cerveau lorsque nous oublions le nom d’une personne. » Un projet que je nous souhaite vraiment de voir dans le futur. Je tenais tout de même à vous présenter Chris dans cet article car il a gagné plus de 50 prix dont un Oscar en 2005 comme Meilleur Court métrage d’animation avec son film Ryan. Il s’agit d’un hommage à Ryan Larkin, un grand réalisateur de films d’animation canadien. À voir absolument.

Je tiens à dire que je n’aime pas la 3D. Elle est pour moi trop « gadget » et gâche souvent l’expérience cinématographique au lieu d’en augmenter l’immersion (comme elle est supposée). Ce n’est que mon humble avis personnel. Mais Munro Ferguson a réussi le pari de me faire reconnaître la valeur de la 3D. Oui, oui. Avec mes lunettes affreuses sur le visage, c’est dans une grande salle (mélange de salle de cinéma et d’un atelier de « patenteux »), qu’il nous a présenté son projet. Le synopsis repose sur les 7 étapes qu’un héros doit parcourir afin d’atteindre son objectif. Et ce, de manière abstraite, en 3D, en 1 seul minute. Il m’a fallu plusieurs minutes pour m’en remettre. L’abstraction de l’univers avec la dimension 3D m’a atteint à un niveau que je ne soupçonnais pas. Pour décrire le visuel, il s’agit d’une composition mi-organique, mi-pseudo synthétique évoluant à travers les images abstraites réalisées avec l’aide du logiciel Sandy. Malheureusement, je n’ai pas d’image à vous montrer puisque le projet n’est qu’à ses débuts. Très prometteur, néanmoins.

Le dernier arrêt de notre visite a eu lieu avec Michèle Lemieux. Elle nous a accueilli dans une salle noire, tranquille, paisible, ou habituellement personne n’est autorisé à entrer. Elle nous a ouvert les portes de sa bulle, littéralement. Vous allez comprendre pourquoi puisque sa technique d’animation est assez particulière, pour ne pas dire unique. Il s’agit de l’utilisation de L’écran d’épingle d’Alexeïeff-Parker. Il n’y en a qu’un seul disponible dans le monde et un deuxième sera bientôt fabriqué pour la France. Il s’agit d’un écran blanc, parsemé de quelques centaines de milliers d’épingles rétractables. Les conditions optimales pour la mise en place de cette technique sont minutieuses. Pour résumer son fonctionnement, l’artiste doit avoir accès à une source de lumière et doit ensuite enfoncer ou ressortir les aiguilles qui, elles, créent de l’ombre due à la lumière. Le tout forme ainsi différents tons de gris. Si vous souhaitez avoir plus de détails, je vous réfère à l’article d’Objectif animation de l’ONF.

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Michéle Lemieux travaille avec l’écran d’épingles.

Un ruban adhésif très voyant sur le plancher délimite la « bulle » de Michèle. Un autre ruban délimite le trépied et sa camera de sa source lumineuse. Pourquoi tant de précautions? Le déplacement de la camera ou de la lumière pourrait coûter jusqu’à 1 mois de travail. On ne parle ici que d’un seul plan, dépendant des projets qui varient de 12 ou 24 images par secondes. Puisqu’elle doit « dessiner/sculpter » sur l’écran d’épingle une image après l’autre, s’il y a une seule erreur, le plan au complet est à refaire. Il n’y a pas de retour en arrière, chaque image dessinée est unique et disparaît à jamais pour faire place à la suivante, créant ainsi l’animation. Aussi difficile que cela puisse paraître, je lui ai demandé qu’est-ce qui l’attire dans cette technique. Elle m’a répondu «Le thrill». Vivre la création avec cette dose d’adrénaline lui procure un grand sentiment d’accomplissement lorsqu’elle termine son animation. Et en ce qui concerne le résultat… je vous laisse en juger par vous même.

J’ai été élevé avec Goldorack, Astro, en passant par Albator et Fred Cailloux. Et je regarde ces artistes, très loin de l’animation commerciale, qui repoussent sans cesse les limites de l’animation à une forme d’art trop peu connue du grand public. Aujourd’hui je me plais à penser que sans ces artisans, nous n’aurions jamais eu les Mystérieuses Cités d’or ou Toy Story.

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